» Je veux que mes ouvrages portent le caractère de l’antiquité, au point que, s’il était possible qu’un Athénien revint au monde, ils lui parussent être l’ouvrage d’un peintre grec. » Jacques-Louis DAVID

 » Sa peinture est un singulier mélange de réalisme et d’idéal …  » Eugène DELACROIX

 » Ce jeune homme montre de la grande manière dans la conduite de son ouvrage. Il a de l’âme, ses têtes ont de l’expression sans affectation ; ses attitudes sont nobles et naturelles. Il dessine, il sait jeter une draperie et faire de beaux plis. Sa couleur est belle sans être brillante. Je désirerais qu’il y eut moins de raideurs dans ses chairs, ses muscles n’ont pas assez de flexibilité en quelques endroits. Rendez, par la pensée, son architecture plus sourde et peut être que ce sera mieux …  » Denis DIDEROT lors du Salon de 1781 ( Extrait de Œuvres complètes de Diderot Tome douzième)

Autoportrait – 1794 – Jacques Louis DAVID ( Musée du Louvre/Paris)

Le Musée du Louvre rend un vibrant hommage à un peintre français très important, rebelle et audacieux, admiré tout autant que jalousé, un incontournable artiste français . Il a traversé des époques riches en évènements français : le règne de Louis XV, celui de Louis XVI, puis la Révolution, la Terreur, l’Empire, et la Restauration qui sera l’époque de son exil. Je veux parler de Jacques-Louis David

Un homme qui a eu en lui de fortes convictions, un peintre qui a mis son art au service de la politique. Son œuvre et sa vie sont d’une grande richesse, sa peinture forte, réaliste, expressive.

Il va toujours resté fidèle au langage rigoriste du néoclassicisme. Son art fut profondément nourri par l’Antiquité, et ce tout en traversant les bouleversements historiques de sa vie et ses engagements politiques .

Beaucoup lui reprocheront ses dérives , ses actes, ses décisions (au moment de la Révolution notamment) , ses orientations politiques, mais, bien des siècles plus tard, ses tableaux fascinent toujours autant, quel que soit le musée dans le monde qui l’expose.

Cette rétrospective a été organisée pour célébrer le bicentenaire de sa mort. Elle s’intitule Jacques-Louis DAVID (jusqu’au 26.1.2026), et réunit des œuvres superbes qui viennent non seulement du Musée du Louvre (lequel est détenteur d’un grand nombre de tableaux et de dessins) mais également de nombreuses autres prestigieuses institutions muséales nationales et internationales comme par exemple le Metropolitan Museum /New York, le château de Versailles, la National Gallery de Washington, le Château de la Malmaison, les Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles etc..

Il fut un grand peintre d’histoire, mais également un excellent, talentueux et exigeant portraitiste. Des portraits réalistes, expressifs, humains et parfois même assez intimistes de sa famille et de ses proches . Dans les deux cas ce sont souvent des tableaux de très grands formats. Des pièces que l’on pourrait qualifier souvent de  » publicitaires  » à savoir pour faire la promotion de ses engagements envers certaines personnalités, la Révolution, puis envers l’Empire. C’est une des raisons, sinon la principale, pour laquelle Napoléon le choisira pour faire son portrait.

Pierre SÉRIZAT (son beau-frère) 1796 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre)
 » Portrait de Charles Pécoul (son beau-père)  » 1794 – Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris)
 » Portrait de Henriette de Verninac (Sœur du peintre Eugène Delacroix) – 1798/99 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre)
 » Portrait de Juliette Récamier » 1800 – Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris) – David a mis fin à l’exécution du tableau en disant à celle qui posait :  » Madame, les femmes ont leurs caprices. Laissez-moi satisfaire le mien. Je laisse votre portrait dans l’état où il se trouve.  » … Il le gardera dans son atelier , l’emmènera dans son exil à Bruxelles et personne ne souhaita en faire l’acquisition.

Un homme engagé : il a été franc-maçon et fréquentait la Loge d’Orléans célèbre pour critiquer ouvertement le roi, la reine et leur Cour. Il était pourtant le protégé de Louis XVI, ce qui lui avait donné la possibilité d’avoir une belle réussite sociale à l’époque. Il réussira à obtenir un atelier et un appartement au Louvre, ainsi que de nombreux avantages. La reconnaissance et la gloire viendront avec des tableaux comme Le Bélisaire, le Serment des Horaces, la mort de Socrate etc…

 » Le Bélisaire demandant l’aumône  » 1780 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris) – Ce tableau lui ouvrira les portes de l’Académie.
 » La mort de Socrate  » 1787 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris) –
 » Le serment des Horaces  » 1784 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris)
 » L’enlèvement des sabines  » 1799 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris) –  » J’ ai entrepris de faire une chose nouvelle . Je veux ramener l’art aux principes qu’on suivait chez les Grecs  » dira le peintre au sujet de ce tableau
La douleur et les regrets d’Andromaque sur le corps d’Hector  » 1783 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris)

Un jour, il reviendra les partisans de la Révolution, les Montagnards de Robespierre, Marat et Danton, après la prise de la Bastille en 1789. Il organisera le transfert des cendres de Voltaire au Panthéon en 1791, deviendra même député de la Convention en 1792, l’Ordinateur des fêtes révolutionnaires. Il dirigera le Comité de sûreté chargé de la police intérieure et plus particulièrement celle de Paris.

Il votera pour l’exécution de Louis XVI, et celle d’un grand nombre de ses proches comme Jacques le maire de Paris Jacques Bailly, le poète André Chénier , la duchesse de Noailles, les Frères Trudaine (des mécènes) etc … , une prise de position lui coûtera son mariage car sa femme était en totale opposition avec ses idées. Elle se réfugiera dans un couvent.

Marie-Antoinette lors de sa conduite à l’échafaud 1793 – Dessin de Jacques-Louis DAVID (Musée du Louvre /Paris)
 » Marat assassiné  » 1793 Jacques Louis DAVID (Musées royaux des Beaux-Arts/Bruxelles) -(Marat a été assassiné en juillet 1793 par Charlotte Corday alors qu’il était dans sa baignoire. David l’a peint l’année de la mort de celui qui était son ami. Pour ce faire, il avait recueilli de nombreuses informations sur la façon dont le meurtre s’était produit. Il a choisi de signer  » A Marat-David  » pour exprimer combien il avait un proche du révolutionnaire.

Baudelaire dira, en 1846, à propos de ce tableau :  » Il y a dans cette œuvre quelque chose de tendre et de poignant à la fois. Dans l’air froid de cette chambre autour de cette froide et funèbre baignoire, une âme voltige …  »

Le chute de Robespierre va mettre un terme à sa carrière politique. Il échappera de justesse à l’échafaud . Toutefois, il comparaitra devant le Tribunal révolutionnaire et sera emprisonné au Palais du Luxembourg durant plusieurs mois.

Son épouse Charlotte, dont il était divorcé, mais qui l’aimait toujours, reviendra auprès de lui et ils se remarieront en 1796. Elle va lui apporter son soutien moral et financier. Il plaidera son innocence en argumentant qu’il n’était  » qu’un artiste  » . Toutefois, il devra renier son passé révolutionnaire pour sortir de prison.

Une fois ces évènements passés, il se remettra à la peinture et se passionnera pour un autre homme politique Napoléon Bonaparte. Ce dernier lui passera commande d’une œuvre qui deviendra célèbre à savoir Bonaparte franchissant le Grand Saint-Bernard en 1800. Lorsque Napoléon sera sacré empereur en 1804, David sera alors réhabilité et deviendra peintre de la Cour, sera nommé chevalier de l’Empire en 1808, puis commandeur de la Légion d’Honneur . C’est lui qui sera appelé pour réaliser Le couronnement de l’empereur à Notre-Dame en 1804. De plus, il portraitise de nombreux généraux, ministres, ambassadeurs, et autres personnalités importantes.

 » Bonaparte franchissant le col du Grand Saint-Bernard  » ²1801 Jacques Louis DAVID (Château de la Malmaison )
 » Portrait du général Bonaparte  » (inachevé) 1797/98 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris)
 » Le sacre de l’Empereur Napoléon Ier et le couronnement de l’impératrice Joséphine en la cathédrale Notre-Dame à Paris le 2 décembre 1804  » 1805/07 Jacques Louis DAVID (Musée du Louvre/Paris)
 » Portrait de Napoléon dans son cabinet de travail  » 1812 Jacques Louis DAVID (National Gallery/Washington)

Napoléon chutera en 1815. Louis XVIII arrive au pouvoir. On reprochera alors à David son passé antimonarchiste et régicide, révolutionnaire, impérial.

Il quittera la France , ne pourra se rendre en Italie comme il l’aurait souhaité dans un premier temp car il était interdit de séjour dans ce pays, et s’établira donc en Belgique en 1825 où Il ouvrira son atelier à Bruxelles et se consacrera à son art. Par l’intermédiaire de proches restés en France, il vendra certains tableaux qui se trouvaient encore dans son atelier parisien.

David est né en 1748 à Paris dans une famille assez aisée de merciers. Ils vivaient rue de la Mégisserie à savoir là où se trouve désormais le théâtre du Châtelet.

Il a 9 ans lorsque son père meurt lors d’un duel resté mystérieux. C’est dans la famille de sa mère qu’il trouve un intérêt important pour l’art. En effet, ses oncles (qui sont aussi ses tuteurs) sont architectes. De plus, le célèbre peintre François Boucher est un lointain cousin qui le fera entrer dans l’atelier de Joseph Marie Vien, un peintre et professeur à l’Académie St Luc, avec lequel le jeune David va partager une relation assez orageuse mais filiale. Tout ceux qui côtoient le jeune home se rendent bien vite compte qu’il a de réelles prédispositions pour cet art, contrairement à ce qu’ils espéraient pour lui, à savoir le voir devenir un architecte.

Parallèlement à sa formation chez Vien, il fréquente également l’Académie royale de peinture afin de se préparer au Grand Prix de Rome. Malheureusement il va échouer à quatre reprises , ce qui l’affectera profondément au point de faire une grève de la faim pendant un certain temps. Finalement, il réussira à l’obtenir 1775.

Cela lui permettra de rester quatre ans en Italie au Palais Mancini de Rome, Via del Corso, qui était la résidence de l’Académie de France dans la capitale italienne. Rome sera un choc artistique pour lui. Il admire les statues, les ruines, les palais, les églises, les maîtres anciens de la sculpture et de la peinture , fréquente les cercles artistiques connus et les académies.

Au départ, il va s’inspirer surtout de l’Antiquité (une période qui le touche pour son idéal de démocratie et de république) , de l’Histoire, et de l’épique. Un jour il détournera ces thèmes pour se pencher et s’engager auprès de la France révolutionnaire.

Il s’est marié en 1782 avec Marguerite Charlotte Pécoul, qui avait 17 ans de moins que lui. Ils auront quatre enfants : Charles – Eugène – Laure et Pauline. Elle venait d’une famille très aisée et son père aidera souvent, financièrement, David que ce soit pour ses voyages ou sa peinture.

L’atelier de David a formé des artistes français, belges, italiens, espagnols et américains : 400 entre 1781 et 1821. Il était fréquenté en grande partie par des hommes, mais il a accueilli également des femmes ( 28 ) que l’on surnommait  » Les Davidiennes  » . Toutes n’étaient pas des peintres qui souhaitaient devenir des professionnelles, mais 8 le deviendront en dépit de tout ce qui pouvait les empêcher de le devenir à l’époque en tant que femme artiste.

Élève de DAVID : Marie Denis VILLERS –  » Une étude de femme d’après nature  » 1802 (Musée du Louvre)
Élève de DAVID : Marie Guillemine BENOIST –  » Autoportrait copiant le Bélisaire de David  » 1786 (Staatliche Kunsthalle / Karlsruhe)

Il aura eu une grande influence sur de nombreux peintres qui seront ses disciples et qui vont constituer la célèbre École de David. Parmi ses élève on compte l’illustre Jean Auguste Ingres. Etienne-Jean Delécluze qui fut peintre, puis critique d’art a, notamment, rédigé un ouvrage de souvenirs précieux, un livre très important , et intéressant, sur ce que furent ses années d’apprentissage dans l’atelier de David (Louis David, son école et son temps) .

 » L’atelier de David  » 1813 Léon Mathieu COCHEREAU (Musée du Louvre/Paris)

Il décèdera en Belgique en 1825 des suites d’ une congestion cérébrale. Compte tenu que les Bourbons se refuseront à ce qu’il soit inhumé en France, il le sera à Bruxelles. Mais à la demande de son fils, son cœur sera placé au cimetière du Père Lachaise à Paris, auprès de son épouse.

«  Laissez-moi où je suis. Je ne demande rien. Je ne voulais que la tranquillité. Je l’éprouve et je suis content. Ce que je devais faire pour la patrie, je l’ai fait. Je lui ai formé une brillante école. J’ai fait des ouvrages classiques que toute l’Europe viendra étudier. J’ai rempli ma tâche.  » Jacques Louis DAVID – Son œuvre testamentaire restera  » Mars désarmé par Vénus  » en 1824 ,qui fait partie des collections des Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles : ci-dessous :

4 réponses à « Jacques-Louis DAVID … »

  1. Un article bien complet et intéressant. Quelle chance de « connaître » ce peintre. Je l’apprécie principalement dans ses portraits, et j’admire sa précision dans les détails. Mais je ne suis pas une grande connaisseuse. Chez moi c’est juste le coup de cœur pour une œuvre, et pas trop la technique qui me fait réagir. Merci pour le partage. Bonne journée.

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    1. Je comprends tout à fait le  » coup de cœur  » Joëlle et suis heureuse que vous ayez mon article. J’avoue avoir plaisir à expliquer un artiste, une œuvre (quel que soit le domaine artistique) , parce que l’on peut mieux apprécier ou comprendre après. Merci pour l’attention portée à mon article ♥ 🎨

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  2. Bel article très fouillé pour compléter la visite au Louvre

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    1. Merci Miriam d’avoir aimé. David est un peintre non seulement talentueux mais avec une vie qui a traversé tant d’évènements importants de l’Histoire de France. J’espère que vous aimerez l’expo, à moins que vous ne l’ayez déjà vue. Passez une belle journée ♥ 🎨

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