» Il n’y a pas si longtemps c’était magnifique d’être le vent. Vous apportiez des senteurs selon les saisons, effeuillez des roses, courbiez les blés, faisiez faire des loopings aux oiseaux, arrachiez les feuilles mortes, séchiez le linge. C’est aussi vous qui faisiez grincer les girouettes, claquer les oriflammes des champs de batailles et, dans certains pays, tourner les moulins. Certains jours, plus polisson, vous emportiez les chapeaux, souleviez les jupes , mais surtout, pendant plus de deux mille ans, c’est vous qui emmeniez les bateaux.
Pas un voyage sur la mer sans vous, pas de Christophe Colomb, pas d’Amérique, pas d’Australie, pas de Polynésie. Jusqu’à il y a cent ans, pas un grain de café ni une lettre d’amour qui ne soit arrivée dans votre aide. Il vous faudrait une vie pour raconter tout ce que vous avez permis de faire. Jadis tout le monde le savait et vous saviez que vous étiez utile et aimé, et en Méditerranée, berceau des civilisations, on avait coutume de dire, quand vous n’étiez pas là, c’est la galère !
Aujourd’hui les moulins tournent sur nucléaire, les sèche-linge aussi, les roses poussent dans les serres en plastique, plus personne ne porte de chapeau et les filles ont des collants sous leurs jupes, et…pour ce qui est des bateaux, nous les marins parlons de vous tout le temps, recherchons sans fin votre compagnie. Vous faiblissez, c’est l’inquiétude. Vous partez, c’est le drame. Nulle part au monde vous n’êtes autant chéri, choyé, attendu ! … » Olivier DE KERSAUSON (Navigateur français, chroniqueur et écrivain -Extrait de son livre Promenades en bord de mer et étonnements heureux)







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