
« La Belle au bois dormant de Marius Petipa et Tchaïkovsky représente l’apogée du ballet classique dans lequel la danse s’affirme comme un art majeur. Cela constitue un évènement historique. Après La Belle, le ballet a pu attirer à lui les plus grands compositeurs qui n’ont plus hésité, alors, à venir travailler avec les chorégraphes. Ce ballet demeure pour moi l’accompagnement parfait de la danse symphonique. Elle exige du chorégraphe d’arriver à trouver l’harmonie parfaite avec la partition de Tchaïkovsky. Il ne s’agit pas de trouver un évènement sans lendemain, mais de produire un spectacle qui retienne l’excellence d’une vie. » Rudolf NOUREEV
La Belle au bois dormant est un conte magnifique qui a bercé notre enfance de petite fille. L’histoire d’un maléfice que vient effacer le baiser d’un prince amoureux. La princesse Aurore est l’une des héroïnes la plus appréciée de tous les temps. C’est un très beau sujet qui n’a pas manqué d’inspirer le monde de la danse, en se basant sur le conte de Charles Perrault en 1697 (Contes de ma mère l’Oye) et celui des Frères Grimm en 1812 . Entre les deux l’histoire est quasiment la même, mais la fin, par contre, est différente.
En danse, la version dite de référence reste, sans contexte, celle de Marius Petipa et Piotr I.Tchaïkovsky. C’est le prince Alexander Vsevolojsky, directeur des théâtres impériaux, qui contactera le compositeur en 1888 pour lui demande de travailler sur la musique d’un nouveau ballet, un de ceux que l’on ne pourrait oublier. La chorégraphie fut confiée à Marius Petipa, lequel s’occupera également de la rédaction du livret avec lui. Tous deux vont s’inspirer du conte de fée des Frères Grimm(Dornröschen) . Le compositeur, de son côté, aura une nette préférence pour celui de Charles Perrault.
Il se souviendra qu’en 1867 il avait écrit une petite musique à l’intention des enfants de sa sœur pour un spectacle monté à partir du conte de Perrault. Partant de là, il souhaitera insérer la musique dans la partition du ballet.
La complexité quasi symphonique de la superbe musique de Tchaïkovsky pour La Belle , va radicalement changer les goûts du public plutôt habitué à entendre, pour la danse, celle d’un Cesare Pugni ou d’un Ludwig Minkus. Mais on savait aussi que les habitués du ballet comptaient parmi eux des personnes jeunes qui se révélaient être beaucoup plus exigeants que leurs aînés et que, par ailleurs, pour un ballet annoncé comme grandiose, il fallait absolument que la musique le soit aussi !

Grâce au talent, au génie musical du compositeur et la grande compétence chorégraphique de Petipa, le ballet va acquérir une grande dignité et de par sa qualité, il va s’approcher quasiment, comme le diront certains, d’une œuvre lyrique.
La chance de La Belle sera, en effet, la collaboration entre ces deux hommes, deux incroyables créateurs. Leur association a été infiniment porteuse et la danse de l’un a fait réellement corps avec la musique de l’autre. Ce ballet amènera une immense notoriété au compositeur dans le monde du ballet et n’ayons pas peur des mots : dans le monde de la danse tout court.
Ces deux hommes ont souhaité que leur ballet représente une sorte d’hommage à la danse française des XVIIe et XVIIIe siècles et porte sur les fastes et splendeurs à la Cour sous le règne de Louis XIV à Versailles. L’idée fut adoptée avec enthousiasme. Tout va être entrepris pour que ce soit merveilleux, pour qu’il y ait assez d’aisance financière pour sa réalisation. Le prince ira même jusqu’à accorder à Petipa un quart de la somme annuelle qu’il octroyait normalement aux théâtres impériaux, ce qui représentait, à l’époque, une somme très importante, voire même énorme, pour une seule pièce.

Petipa se montrera très rigoureux, mettant bien en évidence le bien représenté par la Fée Lilas, et le mal de la Fée Carabosse. Il y aura de la danse de Cour, des éléments du ballet romantique, la technique de la danse classique, des danses folkloriques et bien sur de la pantomime. C’est une chorégraphie superbe, riche. L’apothéose du ballet est son célèbre Pas de Deux : scintillant, imaginé dans l’acte du mariage , un moment extraordinaire !
Le ballet en trois actes, avec Prologue, sera créé en 1890. Le tsar Alexandre III assistera à la première avec sa famille. La première Aurore sera la danseuse italienne Carlotta Brianza qui, ce soir là, portera des vrais pointes de danse.
Ce ballet est d’une grande beauté, avec de l’élégance, un style raffiné, de la délicatesse, de la technique, des échanges dansés parfaits, de la grâce, de nombreuses variations. La construction dans les mouvements est rigoriste que ce soit pour les solistes ou le corps de ballet. Comme l’a dit un jour Noureev : » ce ballet est le chef-d’œuvre de Petipa. Le ballet des ballets ! »
La musique de Tchaïkovsky apporte de la magie à ce ballet. Elle est de qualité, avec un orchestral sublime. La valse, par exemple, est un des moments délicieux. Le compositeur a su s’adapter à toutes les exigences de Petipa, notamment pour le rythme. Ils travailleront en osmose.
J’ai choisi des vidéos de la version de Rudolf Noureev créée pour l’Opéra de Paris en 1989, tout simplement parce que je l’ai vue à différentes reprises et que je la trouve réellement éblouissante, virtuose, créative.
L’ Adagio de la rose : est un des moments magnifiques du ballet. En tous les cas, c’est un passage célèbre et apprécié. Aurore arrive à la Cour. Ses parents souhaitent lui présenter deux prétendants et chacun va esquisser avec elle un pas de danse (normalement en lui offrant une rose). Il y a une grande difficulté technique dans l’exécution car il faut de la rigueur, de la concentration, savoir garder l’équilibre sur les pointes lorsque chacun la fait tourner sur elle-même pour la confier à un autre. Tout cela, bien sur, ne doit pas manquer de grâce !
La Variation des Fées : c’est avec beaucoup d’audace et un zeste d’humour que Petipa avait donné un nom à chacune des fées dans sa version. Chacune ayant sa caractéristique personnelle. Il y avait : la fée Fleur de farine (joie ) – La Fée Canari (musicalité) – la Fée Violente (pétillante ) – la Fée Miettes qui tombent (générosité) – La Fée Lilas (élégance et douceur) – Ainsi que les Fées Or, Diamant, Argent, Saphyr qui apportaient éclat et brillance. Une pièce de musique avait été imaginée pour chacune d’entre elles comme, par exemple, une polka pour la Fée Canari , un galop pour la Fée Violente , ou bien encore une tarentelle pour la Fée Fleur de farine.





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