» Qu’on me laisse partir à présent
Je pèserais si peu sur les eaux
J’emporterais si peu de choses
Quelques visages le ciel d’été
Une rose ouverte

La rivière est si fraîche
La plaie si brûlante
Qu’on me laisse partir à l’heure incandescente
Quand les bêtes furtives
Gagnent l’ombre des granges
Quand la quenouille
Du jour se fait lente

Je m’étendrais doucement sur les eaux
J’écouterais tomber au fond
Ma tristesse comme une pierre
Tandis que le vent dans les saules
Suspendrait mon chant

Passants ne me retenez pas
Plaignez-moi
Car la terre n’a plus de place
Pour l’étrange Ophélie
On a scellé sa voix on a brisé le vase
De sa raison

Le monde m’assassine et cependant
Pourquoi faut-il que le jour soit si pur
L’oiseau si transparent
Et que les fleurs
S’ouvrent à chaque aurore plus candides
Ô beauté
Faisons l’adieu rapide. » Anne PERRIER (Poétesse suisse -Extrait de son recueil Œuvre poétique 1952/1994)

Anne PERRIER 1922/2017 –  »  Je pense, ou je rêve à une manière de « posséder comme ne possédant pas », de prendre en acceptant de perdre aussitôt, je rêve à des gestes désappropriés, à une sorte de possession aux mains ouvertes où le chant passerait comme l’eau entre les doigts. » A.P
« Ophélie » – un tableau de Friedrich Wilhelm Theodor HEYSER

Laisser un commentaire

Tendances