
« Pour moi la mode et le théâtre c’était la même chose en fait. Je mentirais en disant que je voulais être couturier. D’abord je ne sais pas coudre et ça ne m’intéresse pas. Ce qui me plaisait, c’était d’habiller une époque comme on habille des personnages au théâtre. J’ai pu le faire parce que j’ai eu la chance d’arriver dans une décennie éminemment théâtrale qu’ont été les années 1980. » Christian LACROIX

Direction le Centre national du costume et de la scène à Moulins, lequel se trouve dans un lieu qui fut, autrefois, une caserne de cavalerie. Musée depuis 2006, avec pour mission primordiale la conservation, le maintien de l’histoire et la valorisation des costumes de scène. Architecturalement parlant, il a été restauré par les Monuments historiques et comporte : des salles d’expositions permanentes (notamment celle, magnifique, sur Rudolf Noureev) , temporaires, un auditorium, un centre de documentation, une boutique, et restaurant, et, comme je l’ai indiqué, divers espaces destinés à la conservation des costumes (entre 9000 et 10.000).
L’exposition temporaire actuelle est celle consacrée à un merveilleux créateur, autrefois grand couturier, costumier, designer, illustrateur, un érudit qui s’inquiète de la disparition de la culture, de la façon d’on on aborde le monde et l’humanisme, de l’intelligence artificielle , les discours du président Donal Trump, et des fake news : Christian LACROIX, président d’honneur de ce musée. C’est la troisième fois qu’ils collaborent ensemble.
Christian Lacroix est un visionnaire avec un style » baroque » éclatant, flamboyant, haut en couleurs. Ses costumes sont incroyablement beaux, fascinants, réalisés de façon très minutieuse. On peut dire qu’ils racontent, à eux tout seuls, une histoire. Il le dit très bien d’ailleurs : « Il n’y a rien de plus triste qu’un costume qui ne joue pas « .
L’expo s’intitule : Christian LACROIX – En scène (jusqu’au 4 Janvier 2026) – 140 costumes couvrant la période de 2007 à 2024, des dessins, des maquettes, des archives diverses sont présentées en différents espaces allant de la Renaissance à la fin du XIXe siècle, ainsi qu’un petit dernier en fin de parcours traitant des momies, anges, démons et squelettes.
Toutes les pièces présentées ont un vécu, une histoire et viennent de prêts du Centre lui-même, de la Comédie française, de l’Opéra de Paris, de l’Opéra royal du château de Versailles, de l’Opéra de Francfort, des Bouffes du Nord, du Théâtre des champs Elysées, de l’Opéra du Capitole, et autres prêts d’institutions théâtrales ou opératiques étrangères avec lesquelles il collabore depuis de nombreuses années.
Christian Lacroix, né à Arles en 1951, Grand couturier de 1981 à 2009, deux fois Dé d’or dans cette carrière, à la tête d’une Maison de couture créée en 1987, il fera le choix de tout arrêter pour se consacrer uniquement à sa grande passion du costume de scène.
Une passion qui remonte à son enfance » enfant je pensais déjà costumes, je pensais cinéma, je pensais théâtre » … un profond amour de la scène qui pour lui est une sorte de » rempart face à une période qui voit partir en fumée les idéaux de son enfance », de l’opéra, du théâtre, du ballet, et ce qui gravite autour comme par les ateliers de couture ,notamment ceux de la Comédie française et de l’Atelier Caraco avec lesquels il travaille souvent, ainsi que la littérature, la peinture.
Il avoue que lorsqu’il était enfant et adolescent il aimait beaucoup que l’on puisse lui donner à reconstituer une époque et le faisait en essayant, au mieux, de se rapprocher le plus authentiquement possible de cette époque. Ce n’était pas facile, mais c’était le but qu’il recherchait. Cette envie n’a pas changé lorsqu’un metteur en scène fait appel à lui pour des costumes. Il étudie avec minutie des documents d’époque, ou autres inspirations que l’on peut lui proposer, puis apprécie de dialoguer, approfondir et aller au-delà même de l’exactitude historique.
La couleur est quelque chose d’assez obsessionnel chez lui, ainsi que les tissus notamment la dentelle, le tulle, le taffetas, mais aussi les nœuds, les fleurs, les volants, boutons, rubans, et autres borderies diverses et variées de passementerie. Certaines de ces précieuses petites garnitures viennent souvent de costumes anciens trop abimés. Ce qui l’enchante énormément comme il l’explique de façon touchante : » J’aime l’idée qu’un costume qui peut ressurgir du passé, puisse resservir. Je suis sensible à l’idée que des comédiennes et comédiens du XIXe et XXe siècle, ont »habité » ces costumes, comme s’ils les avaient imprégnés de leur texte, de leur talent, en même temps que de leur fard et leur transpiration. J’aime la patine, l’âge, la fatigue qui rendent encore plus parlants ces vestiges. J’aimerais que mes costumes ressemblent toujours à des costumes anciens, fatigués, patinés, vécus, imprégnés à la fois de l’âme des personnages et de la personnalité de leur interprète. Qu’ils portent une lumière intemporelle. Je n’aime pas trop l’aspect du neuf, du lisse, du rutilant. Il me faut l’empreinte des tendresses et violences passées.’ »
Il sait parfaitement apporter à ses costumes ce petit plus qui les font complètement participer à la dramaturgie de la pièce présentée sur scène.
















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