Plumes pointes palettes et partitions

 » Le Dôme de Milan est une des rares églises gothiques de l’Italie, mais ce gothique ne ressemble guère au nôtre. Ce n’est pas cette foi sombre, ce mystère inquiétant, cette profondeur ténébreuse, ces formes émaciées, cet élancement de la terre vers le ciel, ce caractère d’austérité qui répudie la beauté comme trop sensuelle et ne prend de la matière que ce qu’il en faut pour faire un pas au-devant de Dieu ; c’est un gothique plein d’élégance, de grâce et d’éclat qu’on rêverait pour les palais féeriques, et avec lequel on pourrait bâtir des alcazars et des mosquées aussi bien qu’un temple catholique. La délicatesse dans l’énormité et la blancheur lui donnent l’air d’un glacier avec ses mille aiguilles ou d’une gigantesque concrétion de stalactites ; on a peine à croire que ce soit un ouvrage fait de main d’hommes.  » Théophile GAUTIER (Poète, romancier et critique d’art français – Extrait de son livre Voyage en Italie)

 » Au crépuscule, nous sommes arrivés près de Milan et nous avons aperçu la ville et les pics bleus derrière elle. Nous crevait d’envie de voir la célèbre cathédrale ! Finalement, une jungle de flèches gracieuses, luisant dans la lumière ambrée du soleil, s’éleva lentement sur les toits bas des maisons de la même manière que nous observons parfois, à l’horizon lointain, une masse dorée et imposante de nuages ​​s’élevant au-dessus de la étendue de vagues, dans la mer : la cathédrale! Nous l’avons compris immédiatement. Pendant la moitié de la nuit et tout le lendemain, cet autocrate architectural fut l’objet exclusif de notre intérêt. Comme c’est merveilleux ! Si imposant, si solennel, si génial ! Pourtant si délicate, si éthérée, si élégante! Un monde solide qui pourtant, au clair de lune, ressemble à une illusion de fées d’arabesques de glace prêtes à disparaître à voix basse! Avec quelle netteté ses flèches ornées d’anges et la turbulence de ses pinacles se détachaient sur le ciel et avec quelle richesse leurs ombres se projetaient sur son toit blanc! Une vision ! Un miracle ! Un hymne entonné de pierre, un poème gravé dans du marbre !  » Samuel LANGHORNE CLEMENS dit Mark TWAIN (Écrivain, essayiste et humoriste américain – Extrait de sa chronique Nouveaux progrès des pèlerins)

 » Parmi les églises gothiques du nord de l’Italie, la plus célèbre de toutes est la cathédrale de Milan, à laquelle Gian Galeazzo Visconti a voulu laisser un magnifique souvenir de sa seigneurie. Il n’est pas possible de dire avec certitude quel architecte en a dessiné le plan : il a été commencé en 1386 par Simone da Orsenigo ; de 1400 à 1447 les travaux furent dirigés par Filippo degli Organi. De plus, ils ont aidé des architectes des écoles les plus variées et des pays les plus disparates avec des conseils et des travaux, non seulement italiens, mais français, flamands et allemands (Ulrich von Ensingen ; Heinrich von Gmünd, 1391) ; et il semble qu’une certaine perplexité régnait à Milan qui s’explique par la période déjà tardive de construction de l’édifice alors que le véritable sentiment gothique était sur le point de s’estomper. En fait, la manière gothique utilisée ici diffère de celle rencontrée en Italie.  » Anton SPRINGER ( Journaliste politique, historien et historien de l’art allemand)

 » C’est notre cathédrale, c’est l’église de nos aînés, c’est la maison de Milan, elle est toute en marbre, elle est grande, elle est belle . Quand il pleut et que les gens boudent, ou en hiver, quand il y a ces jours sombres, froids et brumeux, même notre cathédrale devient grise, froide, elle se blottit dans les nuages, elle semble pleurer de tous côtés. Mais si le ciel clair revient comme on le voit parfois les matins d’avril et de mai, Jésus, quelle joie pour ces cent petites flèches de sucre qui piquent l’air, éclairées à leurs extrémités par le premier soleil qui les chatouille ! Joie de la dentelle, de la broderie, des petites échelles, des escargots, des gribouillis, des pigeons qui font l’amour dans les mains des saintes vierges de pierre, ou sur l’épée du patriarche, eux qui regardent en bas depuis trois siècles, et s’ils parlaient ! Le soleil allume des lumières jusqu’aux vitraux colorés ; Il fait pousser des fleurs rouges, jaunes, vertes et violettes sur les piliers, le sol et les autels.  » Emilio DE MARCHI (Romancier italien)