» Bien avant de peindre ou de teindre, l’homme a observé les couleurs de la nature. Il les a d’abord admirées, puis distinguées, enfin reconnues. Plus tard, alors qu’il demeurait nomade mais qu’il vivait depuis longtemps en société, il les a nommées, pensées, classées. Parmi ces couleurs, en maints endroits, le vert de la végétation était la couleur dominante. Est-ce la raison pour laquelle cette couleur est absente des premières palettes conçues et mises en scène par l’être humain ? Ce dernier, lorsqu’il a commencé à fabriquer ses propres couleurs, a-t-il délibérément évité de reproduire celle qui était foisonnante dans l’univers qui l’entourait ? Ou bien cette absence du vert est-elle due à d’autres raisons, matérielles, techniques, biologiques, voire idéologiques ou symboliques ? …. De même il est presque impossible d’avouer que l’on a le vert pour couleur préférée sans être aussitôt assimilé à un défenseur de l’environnement, des énergies naturelles, de l’agriculture biologique, voire à un authentique militant écologiste ! Tout un courant de pensée semble avoir confisqué l’usage et la symbolique du vert. Celui-ci n’est plus tant une couleur qu’une idéologie. Il y a quelques décennies c’était le rouge qui était prisonnier d’une symbolique trop forte. Aujourd’hui c’est le vert qui est victime de telles assimilations rapides et réductrices.  » Michel PASTOUREAU (Historien médiéviste, spécialiste de la symbolique des couleurs, des emblèmes et surtout de l’héraldique – Extrait de son livre Vert-Histoire d’une couleur)

« Le vert absolu est la couleur la plus anesthésiante qui soit. Elle ne se meut dans aucune direction et n’a aucune consonance de joie, de tristesse ou de passion ; elle ne réclame rien, n’attire vers rien. Cette absence permanente de mouvement est certes une qualité bienfaisante pour des âmes et des hommes fatigués, mais devient, après un certain temps de repos fastidieuse . La passivité est la propriété caractéristique du vert pur, propriété se parfumant cependant d’une sorte d’onction, de contentement de soi. C’est pourquoi, dans le domaine des couleurs, le vert correspond à ce que représente, dans la société des hommes, la bourgeoisie : c’est un élément immobile, satisfait de lui-même, limité dans toutes les directions. Ce vert est semblable à une grosse vache, pleine de santé, couchée, figée, capable seulement de ruminer en contemplant le monde de ses yeux stupides et inexpressifs. » Vassily KANDINSKY( Peintre russe naturalisé allemand puis français )

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