Plumes pointes palettes et partitions

 » Avant de commencer, causez avec votre modèle. Essayez plusieurs attitudes et choisissez non seulement la plus agréable, mais celle qui convient à son âge et à son caractère, ce qui peut ajouter à la ressemblance. Faites de même pour sa tête : placez-là de face ou de trois quarts, cela ajouter plus ou moins à la vérité des traits, surtout pour le public : le miroir peut aussi décider à ce sujet.

Il faut tâcher de faire la tête (le masque surtout) dans trois ou autre séances de une heure et demie chaque, deux heures tout au plus, car le modèle s’impatiente (ce qu’il faut éviter ! ) . Son visage change visiblement. C’est pourquoi, il faut le faire se reposer et le distraire le plus possible. Cela est d’expérience avec les femmes. Il faut les flatter, leur dire qu’elles sont belles, qu’elles ont le teint frais etc… Cela les met de bonne humeur et les fait tenir avec plus de plaisir. Le contraire les changerait visiblement. Il faut donc aussi leur dire qu’elle posent à merveille. Elles se trouvent alors engagées par là à bien se tenir.

Si l’on doit peindre une gorge, éclairez-là de façon qu’elle reçoive bien la lumière ; les plus belles gorges sont celles dont la lumière n’est point interceptée, jusqu’au bouton qui se colore peu à peu à l’extrémité ; les demi-teintes qui font tourner le sein doivent être du ton le plus fin et le plus frais ; l’ombre qui dérive de la saillie de la gorge doit être chaude et transparente.

Il faut recommander de ne point amener de sociétés. Toutes veulent donner leur avis et font tout gâter. Quand aux artistes et aux gens de goût, on peut les consulter. Ne rebutez pas si quelques personnes ne trouvent aucune ressemblance à vos portraits : il y a tant de gens qui ne savent point voir. » Louise Elisabeth VIGÉE-LEBRUN (Peintre française – Extraits de son livre Souvenirs-Les femmes régnaient alors, la Révolution les a détrônées )