
« L’heure est venue de franchir une étape nouvelle et de restaurer l’Olympiade dans sa beauté première. Les lettres et les arts, harmonieusement combinés avec le sport, assuraient la grandeur des J.O. et doit en être de même à l’avenir. » Pierre de COUBERTIN en 1904.
Comme vous le savez, Paris accueillera, cette année, les jeux olympiques et paralympiques du 26.7. au 11.8.2024. A cette occasion, de nombreux musées parisiens vont proposer, en parallèle, des expositions diverses et variées, ainsi que des spectacles se rapportant à cet évènement, le tout labellisé par le Comité olympique.
J’en ai choisi une, à savoir celle fort intéressante du Musée Marmottan-Monet. Elle s’intitule EN JEU – Les artistes et le sport 1870-1930 –jusqu’au 1er.9.2024 soit 160 œuvres : tableaux, sculptures, gravures, affiches, documents, dessins, photos, prêts de grands musées français et étrangers et collections particulières internationales : Musée d’Orsay, National Gallery de Washington, Centre Pompidou, Musée intercommunal de Nogent-sur-Marne, Musée du sport à Nice, Musée Bourdelle, Collection Peggy Guggenheim, Musée Fabre, Knupp Gallery de Prague, Philadelphia Museum of art, Yale University Art Gallery, Musée Antoine Lécuyer à Saint-Quentin, etc… Des œuvres (une première pour certaines) signées de grands maîtres impressionnistes : Renoir, Monet, Delaunay, Sisley, Richer, Abbéma, Eakins, Courbet, Bourdelle, Toulouse Lautrec, Van Dongen, Caillebotte, Maillol, Degas, Köshirö, Gueldry, Metzinger, Faivre, Bellows, Bonnard, Friant etc…
Le parcours se déroule de façon chronologique, de 1870 à 1930. Pourquoi avoir choisi cette période plus qu’une autre me direz-vous ? Tout simplement parce que c’est durant ces années que le sport s’est popularisé en Europe. Il a été un thème moderne intéressant et fascinant pour les artistes que ce soit au bord de l’eau (régates, aviron, canotage, natation) , ceux plus élitistes (escrime, tennis, équitation) ou très populaires (football, rugby, boxe, lutte, la course, le cyclisme)








Un petit rappel historique : les premiers J.O. ont eu lieu en 756 avant .J.C à Olympe en Grèce. Ils le furent afin d’honorer le Dieu Zeus. En 393, ils furent abolis par l’empereur romain Théodore Ier.
Lorsque l’on parle de cet évènement, on pense, bien sur, au visionnaire Pierre de Coubertin (1863/1937). Sa passion du sport, découvert en Angleterre, s’est déclarée lorsqu’il était très jeune. Non seulement il aimait le sport mais il l’a pratiqué aussi : escrime, aviron, équitation, boxe et tir au pistolet.
Un passionné qui a propagé l’idée que le sport devait entrer dans l’éducation et pour mieux de faire entendre, il a créé un comité lui permettant de diffuser ses idées. Il deviendra, également, en 1888, directeur de l’Union des sociétés françaises de sport athlétique. En 1894, il commence à imaginer la création d’une version contemporaine des olympiades grecques, non pas uniquement avec la France, mais des jeux réunissant des peuples venus des quatre coins du monde. Les premiers auront lieu en Grèce, à Athènes, en 1896. Malheureusement, ce sera un fiasco.
Les jeux de Coubertin ont fait évoluer les esprits . Ce type d’évènement a rassemblé les peuples, les émotions ressenties sont fortes.
L’art a eu à cœur de mettre le sport en image dès l’Antiquité. On retrouve, en effet, la représentation du sport dans la Grèce antique que ce soit sur des fresques murales, des sculptures, des vases ou des mosaïques. On y voit des athlètes en mouvement, lançant un disque ou tirant à l’arc, avec une musculature souvent idéalisée. Les siècles passant, on pourra assister, picturalement parlant, à des parties de jeu de paume à la Cour des rois de France.
Pour des questions diverses, et notamment de religion, le sport n’a plus retenu l’intérêt des artistes. Puis, il est revenu fin du XIXe siècle avec les activités en plein air qui ont attiré, notamment, les peintres impressionnistes qui se trouvaient en extérieur avec leur chevalet et leurs pinceaux , prêts à saisir l’instant durant leurs promenades picturales quelle qu’en soit la saison, ou assister à des compétitions sportives même s’ils ne s’intéressaient pas vraiment aux règles.
Ils ont été fascinés par le corps en mouvement, le dynamisme, l’effort physique, la beauté du geste, l’harmonie entre corps et âme, entre physique et mental, mais c’était aussi entrer dans la vie quotidienne des gens et de leurs loisirs. Le sport a offert de beaux et passionnants sujets à l’art.


Sport et artistes sont, souvent, liés : on fait appel à des artistes pour des affiches publicitaires d’évènements , des compétitions ou équipements sportifs – Inversement, il arrive que des concerts soient donnés dans des stades ou que d’anciens lieux sportifs deviennent des musées comme, par exemple, la Piscine à Roubaix.
Et n’oublions pas, également, qu’entre 1912 et 1948, l’art fut associé au sport dans les J.O. – On a distribué bon nombre de médailles non seulement pour le sport, mais pour la musique, l’architecture, la littérature, la sculpture, la musique, la peinture. Pierre De Coubertin trouvait qu’il n’y avait rien d’absurde dans cette décision parce que les deux étaient liés et que cela permettait de se rappeler les jeux dans la Grèce antique. En effet, aux yeux des grecs, le sport était un art dans la perfection plastique .
L’art et le sport nécessitent, tous deux, qu’il y ait des spectateurs. C’est quelque chose de franchement indispensable dans le sport cette ferveur et ses encouragements du public, et , inversement, une œuvre a besoin d’un public pour se faire connaitre et continuer de vivre. De plus, la notion de performance et endurance existe dans les deux même si elle est différente. Il y a de l’énergie dans le sport, du dépassement de soi et les artistes se retrouvent souvent dans ces qualités.
Il n’est pas facile de représenter le sport en mouvement, la vitesse, voire même les chutes. Les artistes s’y emploient en faisant de nombreux dessins préparatoires afin que le résultat pictural, qu’ils souhaitent obtenir, rejoigne au mieux la réalité de la mémoire visuelle.
Par ailleurs, les artistes ont été fortement inspirés par différentes disciplines. Non seulement ils ont été intéressés, mais ils ont pratiqué, comme par exemple :
-Signac , qui a été un excellent régatier et aimait aussi faire du vélo en amateur. Il a remporté des courses dans les deux catégories. Un passionné par la mer qui a possédé 32 bateaux. On le surnommait le peintre du département de la marine.
-Eakins , le célèbre peintre américain, était un spécialiste du skiff (canoé à une place)
-Caillebotte était yachtman et Ferdinand Gueldry un excellent rameur.
-Gauguin, de nature plutôt bagarreuse, pratiquera la boxe et la lutte
-De Monfreid fut cycliste
-Carolus-Duran fut escrimeur. Il était assez bon d’ailleurs et fut souvent invité par des salles d’armes françaises. Il sera même nommé Président de la société française d’escrime.
-Ropps, peintre et dessinateur, fut attiré, comme beaucoup, par la mer. Il fut un rameur et navigateur passionné. C’est lui qui a fondé à Namur, en 1862, le Royal Club nautique.
-Matisse, de son côté, s’octroyait une heure par jour de canoé car cela contribuait, semble t-il, à garder un bon équilibre mental et physique.
Comme je l’ai dit, le sport est devenu, dans la seconde moitié du XIXe siècle, plus populaire qu’il ne l’était auparavant. En effet, autrefois, il était plutôt réservé à un milieu social aristocratique anglais ( escrime, tennis, équitation). Les artistes sont devenus les témoins de cette popularisation du sport, notamment les impressionnistes qui se trouvaient en bordure de Seine ou de Tamise : Caillebotte nous a offert de magnifiques tableaux sur les plaisirs de la natation, du plongeon qu’il exécutait avec son frère Martial dans leur propriété à Yerres en Essonne, ou Onchi Köshirö et sa magnifique gravure d’un plongeon inspiré par une fresque de la nécropole de Paestrium en Italie.



Pour Monet, Caillebotte, et Renoir ce seront les régates à Argenteuil, pour Sisley celles de Molesey. Pour d’autres le canotage. Pour les plus » modernes » comme Bonnard, Gauguin, Bellows ou Friant c’est la boxe et la lutte qui retiendront leur attention.




La course hippique a fait des adeptes elle aussi. Elle a été connue en France en 1830 grâce à lord anglais, Henry Seymour. La construction de l’hippodrome de Chantilly en 1834, celui de Longchamp en 1857 et Auteuil en 1873, ont largement contribué à l’attrait de beaucoup d’artistes comme Degas, cavalier lui-même, qui a beaucoup peint dans ce domaine (jockeys, chevaux, champs de course) ou Kees von Dongen et Toulouse Lautrec avec un autre regard plus porté sur le mouvement et la vitesse.



On parle aussi des femmes dans cette exposition. Il faut savoir qu’au départ elles n’étaient pas du tout acceptées dans le sport. Elles devaient se contenter de regarder les hommes en faire. Si elles ont pratiqué un sport au départ, c’était dans les cirques comme écuyère par exemple. Pour le reste, on les pensait trop fragiles face à la force d’un homme. Les années passant, elles ont fini par s’essayer à l’équitation, au tennis, au golf, voire même à la course automobile, à la lutte et au tir.









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