« Un matin l’un de nous manquant de noir se servit du bleu : l’impressionnisme était né «  Pierre Auguste RENOIR (Peintre français)

 » C’est à eux, les impressionnistes, que nous devons l’étude du plein air, la sensation non plus seulement des couleurs, mais des moindres nuances, les tons, et encore la recherche des rapports entre l’état de l’atmosphère qui éclaire le tableau et la banalité générale des objets qui s’y trouvent peints.  » Théodore DURET(Écrivain, journaliste et critique d’art français)

« Ils partent à l’aube, la boite au dos, heureux comme des chasseurs qui aiment le plein air. Ils vont s’asseoir n’importe où, là bas à la lisière de la forêt, ou au bord de l’eau, choisissant à peine leurs motifs, trouvant partout un horizon vivant, d’un intérêt humain pour ainsi dire. » Emile ZOLA (Écrivain français)

Il y a 50 ans, en 1974, le Grand Palais avait soufflé les bougies du centenaire de l’impressionnisme. Toutefois, à la différence de cette année, l’anniversaire avait été fêté sur Paris uniquement. En 2024, ce sont de nombreuses régions françaises qui le feront, treize pour être précis avec un prêt de 178 œuvres de la part du Musée d’Orsay. Il ne faut pas oublier que ce lieu est détenteur d’une collection importante de ce mouvement, soit environ 400 chefs-d’œuvre.

L’expo, organisée par le Musée d’Orsay, la National Gallery of Art de Washington (qui la présentera de septembre 2024 à Janvier 2025) et le Musée de l’Orangerie, s’intitule : PARIS 1874 -Inventer l’ impressionnisme … Jusqu’au 14 Juillet 2024. au travers de tableaux impressionnistes bien sur, dont certains ont fait partie de l’expo de 1874 mais également quelques autres, pré, para, ou post impressionnistes (tableaux et sculptures présentées au Salon officiel à l’époque) .  pour bien montrer l’évolution que ce mouvement a connu, sa richesse.

Beaucoup d’œuvres viennent du Musée d’Orsay, de musées étrangers et collections particulières , mais d’autres sont des prêts accordés par des institutions muséales françaises afin d’honorer le fait que ces peintres ont peint à Paris mais aussi un peu partout en France.

La subtile peinture impressionniste est, de nos jours, très populaire, fort appréciée du public, la fierté des musées et des collectionneurs. C’est une période fascinante de l’histoire de l’art car ces peintres intransigeants, ces révoltés comme on le disait, ont révolutionné tant d’une manière esthétique qu’artistique . Ils ont apporté un vent de fraîcheur à l’art.

Pourtant à une époque, les tableaux impressionnistes faisaient l’objet de nombreuses critiques, tout simplement parce qu’ils ne reprenaient pas les thèmes qui avaient cours à l’Académie royale de peinture et de sculpture, et que les idées véhiculées par ces artistes allaient complètement à l’encontre de celle prônées par l’Institution. Du reste, ces peintres étaient marginalisés, on ne comprenait absolument pas leur travail, le public y compris . Quelque part c’était bien trop  » moderne et novateur  » ! L’impressionnisme c’est tout autant une nouvelle façon de peindre que de voir la peinture.

Caricature de Amédée DE NOÉ dit CHAM (Illustrateur et caricaturiste) en 1874 dans la revue Charivari

L’impressionnisme va envisager la peinture en extérieur de façon différente de ce qui avait été fait auparavant. Le fait que le peintre paysagiste américain John Goffe Rand dépose son brevet de commercialisation de la peinture en tubes en 1841, va considérablement changer les choses. Cela facilitera le travail des peintres lorsqu’ils se déplaçaient en extérieur : ils pouvaient alors poser leur chevalet en plein air et peindre sur le motif sans passer par l’atelier.

« Ce sont les couleurs en tubes, facilement transportables, qui nous ont permis de peindre complètement sur nature. Sans les couleurs en tubes pas de Cézanne, pas de Monet, pas de Sisley, pas de Pissarro, pas de ce que les journalistes devaient un jour appeler : l’impressionnisme  » Pierre Auguste RENOIR

 » La loge aux Italiens  » 1874 Eva GONZALÉS (Musée d’Orsay/Paris)
 » Le berceau  » 1872 – Berthe MORISOT (Musée d’ Orsay/Paris)
« Un coin d’appartement  » 1875 – Claude MONET (Musée d’Orsay/Paris)

Leur intérêt ne va pas uniquement se focaliser sur le paysage qui les entoure en extérieur, mais plutôt de retranscrire, sur la toile, leurs ressentis émotionnels personnels face au temps s’écoule autour d’eux, comment la lumière et le paysage évoluent selon les changements météorologiques aux différents heures de la journée, jouer avec cette lumière. Ils peignent aussi des personnages, la ville avec ses boulevards, ses jardins, les forêts, la mer et ses reflets, les ports, les plages, etc.. et à partir de là ils donneront un rendu absolument magnifique de toutes les variations qui en découlent. C’est une petite révolution dans le monde artistique de l’art au XIXe siècle, et qui influencera la génération qui viendra après eux.

 » Nous aimons la nature, le plein air, les différentes impressions que nous éprouvons. Toutes théories factices, nous les répudions. «  Camille PISSARRO

 » Le port de Lorient » 1869 Berthe MORISOT (National Gallery of Art/Washington)
« Un train dans la campagne » 1870 Claude MONET (Musée d’Orsay)
« La lecture  » 1873 Berthe MORISOT (The Cleveland Museum of Art / Cleveland )
 » Gelée blanche, champs labouré  » 1873 Camille PISSARRO (Musée d’Orsay/Paris)
 » Coquelicots  » Claude MONET 1873 (Musée d’Orsay/Paris)
 » L’inondation à Port-Marly  » 1876 Alfred SISLEY (Musée d’Orsay/Paris)
 » Soleil couchant à Ivry  » 1873 Armand GUILLAUMIN (Musée Orsay/Paris)

« Je crois qu’il faut entendre par peintres impressionnistes, des peintres qui peignent la réalité et qui se piquent de donner l’impression même de la nature qu’ils n’étudient pas dans ses détails mais dans son ensemble. Il est certain qu’à vingt ans on ne distingue nettement ni le nez, ni les yeux d’un personnage. Pour le rendre tel qu’on le voit, il ne faut pas le peindre avec les rides de la peau, mais dans la vie de son attitude, avec l’air vibrant qui l’entoure. «  Émile Zola en 1877

« Je peins ce que je vois et non ce qu’il plait aux autres de voir «  (Edouard Manet – Ce dernier avait participé au Salon des refusés mais il n’a pas souhaité le faire à l’expo de 1874 par crainte de ne plus avoir la possibilité ou la chance d’être admis au Salon officiel- D’autres ne se sont pas posés ce genre de questions et ils ont participé aux deux !)

 » Le chemin de fer  » 1873 – Édouard MANET (National Gallery of Art / Washington)

Il y a tant de lumière chez les impressionnistes ! Celle du soleil quand il se lève, ou se couche à chaque heure d’une nouvelle saison, celle du chatoiement des reflets sur l’eau ; il y a la couleur qui est primordiale, une couleur claire, pure. Ils ont eu en commun de faire une découverte venue de l’extérieur à savoir que cette fabuleuse lumière venait aussi bien de l’eau que du ciel au travers des branches des arbres par exemple, qu’elle pouvait se se retrouver sur les personnes comme sur des habitations, que rien ne pouvait se comparer à elle et à toutes les variations qu’elle offrait. Ils vont donc faire le choix de se focaliser sur elle, de renoncer à tous les principes qui avaient été enseigné auparavant. Ils vont inventer un nouvel art de peindre.

 » Cache-Cache « 1873 Berthe MORISOT (Collection particulière) – En 1877 lors d’une autre exposition impressionniste, Paul Mantz, historien de l’art, écrira dans la revue Le Temps :  » La vérité c’est qu’il n’y a qu’un impressionniste dans le groupe, c’est Melle Berthe Morisot. On l’a déjà louée, il faut la louer encore. Lorsqu’elle joue avec la gamme des tons clairs, elle trouve des gris d’une finesse extrême et des roses de la pâleur la plus délicate. Elle a des accès d’audace….  »
 » Matinée de juin à Pontoise  » 1873 Camille PISSARRO (Staatliche Kunsthalle de Karlsruhe /Allemagne)  
 » Déjeuner sur l’herbe  » 1865/66 Claude MONET (Musée d’Orsay/Paris)
‘ Le Pont du chemin de fer à Argenteuil  » 1873/74 Claude MONET (Musée d’Orsay/Paris)

Ce regard n’est pas entièrement nouveau d’ailleurs, parce que les aquarellistes anglais s’étaient quelque peu intéressés, avant eux, à cette façon de saisir la lumière. Eugène Boudin l’avait fait lui aussi, ainsi que les peintres de Barbizon . Ce qui, dirons nous, était nouveau chez les impressionnistes, c’est qu’ils vont intensifier les recherches à ce sujet.

L’Académie royale de peinture et sculpture a été créée en 1648. Durant des années et des années, elle a dominé le monde de l’art. Elle imposait des règles auxquelles il était difficile de se soustraire, et il y avait une seule exposition officielle : le Salon, qui a vu le jour en 1667, dont les membres du jury n’étaient autres que des personnalités issues de l’Académie. Les artistes que l’on classera plus tard comme impressionnistes se considéraient comme des artistes libres , préférant nettement fréquenter les ateliers plutôt que l’École des Beaux Arts.

Pour être admis au Salon officiel, qui se tenait à Paris une fois par an, il fallait se conformer à un style et une thématique imposée par un jury très rigoureux. Depuis 1857, il se tenait aux Champs-Elysées dans les galeries du Palais de l’Industrie . Ceux qui venaient y exposer, avaient une grande envie d’être reconnus et faire carrière et ils savaient que ce Salon permettait de le faire. On distribuait des prix, des médailles, on facilitait la rencontre avec des personnes importantes : bref, si l’on voulait réussir il fallait en passer par là.

Les émancipations n’étaient pas franchement appréciées à l’époque, et toute tentative, en ce sens, n’atteignait pas son but. Les impressionnistes, eux, auront cette audace . Ce sont des indépendants. Leur première expo ne recevra aucune contrainte. Ils ont présenté ce qu’ils ont eu envie de montrer. Personne n’a été là pour valider leur travail, personne pour les sanctionner. Les juges s’étaient eux et eux seuls.

C’est d’ailleurs eux qui ont choisi le lieu, l’accrochage etc… Ils souhaitaient innover, peindre avec plus de liberté, de spontanéité, de lumière . Leur référant : Gustave Courbet et l’École de Barbizon, mais aussi l’évolution et la modernité du contexte économique, artistique et culturel de leur époque, sans oublier l’influence de l’estampe japonaise qui mettait en évidence la lumière ainsi que les motifs simplifiés.

Leur art n’est pas que subjectif, il est précis, réaliste, spontané. Techniquement parlant ce sont des novateurs. Ils ont voulu dépoussiérer ce qui fut et avancer vers quelque chose de nouveau, transgresser les codes établis, voire autrement le rôle du dessin, reconsidérer la perspective, la composition en peinture. Ils abandonneront les techniques traditionnelles pour d’autres : moins de détails, la représentation de la vie moderne, la réalité heureuse de la nature comme celle des loisirs, moins de clair-obscur, plus de couleurs claires, plus de lumière, de fraîcheur, des contours plus précis, la couleur appliquée sur la toile en petites touches qui se juxtaposent et se fondent.

 » La gare Saint-Lazare  » 1877 Claude MONET (Musée Orsay/Paris)
 » Le jardin à Pontoise  » 1874 – Camille PISSARRO (Metropolitan Museum / New York)

Ensemble, ils vont peindre avec leurs différences, leur talent individuel, leurs propres convictions et leurs ressentis, laissant derrière eux le passé pictural et la peinture d’histoire. Dans leur quête de liberté, de modernité, ils se sont révoltés contre l’immobilisme officiel.

Ils furent unis, au départ, par un esprit de camaraderie, s’admirant, échangeant entre eux, se motivant , de façon bienveillante, même avec leurs différences, revendiquant leur liberté de peindre, tous poussés par une envie de rejeter les conventions picturales et artistiques du passé.

Certains d’entre eux, qui furent pourtant actifs dans ce mouvement, seront un jour oubliés : Rouart notamment qui , pourtant les a beaucoup aidés d’un point de vue financier , mais aussi Béliard, Vignon, Astruc ou Piette ; ou bien encore Édouard Brandon qui n’a jamais réussi à véritablement faire carrière.

« Les Terrasses à Melun  » Henri ROUART ( Musée Orsay/Paris)
« Pontoise depuis l’écluse » 1872/75 Edouard BÉLIARD (Musée Camille Pissarro à Pontoise)
 » Femme endormie dans un intérieur artistique-scène de somnambulisme  » 1871 – Zacharie ASTRUC (Musée de l’Opéra / Vichy)
 » Rue Saint-Vincent à Montmartre  » Stanislas LEPINE (Musée Orsay/Pairs)
 » Champs en juin  » 1874 François DAUBIGNY ( Herbert Johnson Museum of Art /New York)

Les artistes de ce mouvement, n’étaient pas des peintres reconnus. En 1860, on les surnommait Le groupe des Batignoles. On pouvait les rencontrer au Café Clerbois ou bien dans l’atelier de Manet . Ils étaient en marge du Salon officiel. On disait d’eux qu’ils étaient des barbouilleurs, et la plupart connaissait la misère. Leur unité, bien que cordiale, n’était pas sans tension car chacun avait sa personnalité et ses idées. Par exemple, Degas ne souhaitait pas peindre en plein air et il était de ceux qui étaient favorables à ouvrir leur mouvement à d’autres artistes, alors que Monet faisait partie de ceux qui préféraient que le groupe reste restreint plus pour de cohérence.

 » ne me parlez pas de ces gaillards qui encombrent les champs avec leurs chevalets. Je voudrais avoir la puissance d’un tyran despotique pour armer une police qui fusillerait impitoyablement, comme des animaux nuisibles, ces misérables embusqués dans la verdure avec leurs stupides boucliers de toile blanche  » Edgar DEGAS

 » La classe de danse  » 1870 Edgar DEGAS (Metropolitan Museum/New York)
 » La repasseuse  » 1869 -(Pastel) – Edgar DEGAS ( Musée Orsay/Paris)
Atelier Nadar 35 boulevard des Capucines à Paris – Nadar, c’est Félix Tournachon. Un photographe, aérostier, caricaturiste, journaliste, romancier, qui a toujours eu une sainte horreur des jurys. Il aimait les expositions libres et n’a jamais hésité à le crier haut et fort. C’est un bohême, ami fidèle de Gérard de Nerval et Théophile Gautier.
Couverture du catalogue de la première expo 1874

C’est donc le 15.4.1874, , 35 boulevard des Capucines à Paris, dans l’ancien atelier du photographe Nadar qu’aura lieu la première exposition impressionniste organisée par une trentaine d’ artistes dont, si je puis dire, le noyau dur : Monet, Pissarro, Morizot, Degas, Renoir, Sisley, Guillaumin, et autres, rejetés par le Salon Officiel des Beaux Arts de Paris. Le nom de leur groupe en 1873 était : Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs, graveurs.

Impressionnisme … Le nom vient du journaliste Louis Leroy qui l’évoquera, de façon plutôt ironique, dans un article qu’il publiera en avril 1874 dans la revue Le Charivari :  » que représente cette toile ? Impression soleil levant… Impression, j’en étais sûr, je me disais aussi, puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l’impression là-dedans. Et quelle liberté, quelle aisance dans la facture ! Le papier peint? à l’état embryonnaire, est encore plus fait que cette marine là. »

Ce que Monet a souhaité montrer, avant toute chose, dans son tableau Impression Soleil levant , ce sont les effets de la lumière. Les détails ou la netteté des formes n’étaient pas son but premier. Avant qu’il ne lui donne le nom qu’on lui connait, il s’appelait Marine. . On distingue des silhouettes de bateaux qui laissent à penser qu’il s’agit bien d’un port. En effet, il s’agit du port du Havre, tôt le matin, dans la brume.

 » Impression Soleil levant  » 1872 Claude MONET (Musée Marmottan-Monet / Paris)

Le thème choisi était l’un de ses préférés. La date a fait beaucoup parler. En effet, certains ont affirmé qu’il aurait été peint en 1873 soleil couchant, mais que Monet l’aurait signé avec un nom et une date (1872) lors de sa vente. Après une analyse sérieuse organisée par le Musée Marmottan-Monet en 2014, des historiens de l’art (Dominique Lobstein et Géraldine Durand-Ruel) en collaboration avec l’astrophysicien Donal Olson, il a été confirmé que, se référant à des trajectoires du ciel et des bulletins météorologiques de l’époque, le soleil était levant et que 1872 est l’année la plus probable.

L’idée d’une exposition indépendante avait déjà germé dans la tête de ces artistes dès 1867. Elle n’aura finalement lieu que 7 ans plus tard en raison de la guerre franco-prussienne et la Commune. Après l’expo de 1874, Ils garderont le nom qu’on va leur donner : impressionnistes. On ne peut pas dire qu’il plaira à tous. Edgard Degas qui n’était pas du même avis que la majorité d’entre eux, et ce même si il a participé à de nombreux Salons impressionnistes. Il aurait préféré le terme Indépendants.

Ce sera lors de la troisième expo de ces peintres, en 1877, qu’ils accepteront définitivement la dénomination  » impressionnistes  » en inscrivant ce terme sur une sorte de drapeau à l’entrée et c’est année là aussi qu’ils feront publier la première revue qui porte cet intitulé (L’impressionniste)

Pourtant Monet lui-même reviendra sur ce nom en 1926, peu de temps avant qu’il ne décède. Il dira :  » J’ai toujours eu horreur des théories. Je n’ai que le mérite d’avoir peint directement devant la nature en cherchant à rendre mes impressions devant les effets fugitifs, et je reste désolé d’avoir été la cause du nom donné à un groupe d’artistes dont la plupart n’avait rien d’impressionnistes. »

Cent soixante-sept œuvres seront exposées chez Nadar , un peu dans un accrochage fourre-tout semble t-il dont s’était occupé Renoir , avec un éclairage au gaz plutôt pâle donc ne mettant pas véritablement en valeur les pièces présentées. Pas de mythologie, pas de peinture d’histoire, de genre ou de guerre, mais des peintures à l’huile, des pastels, des gravures, des aquarelles, des lithographies, des sculptures, de la terre cuite.

 » La danseuse  » Pierre Auguste RENOIR 1874 ( National Gallery /Washington)
 » Une moderne Olympia  » 1873/74 Paul CÉZANNE (Musée d’Orsay/Paris)

Les sujets sont des paysages, des portraits, des scènes du quotidien en milieu bourgeois et en milieu ouvrier, des scènes intimes familiales et ce avec un style novateur, des thèmes qui ne sont ni antiques ni religieux, des couleurs lumineuses, claires. On crie au scandale. On ne comprend pas cette peinture appliquée en petites touches juxtaposées que certains comparent, d’ailleurs, à celle que propose la technique du faux granit dans le bâtiment !

Trente et un artistes exposeront et une dizaine d’entre eux le feront aussi au Salon officiel comme, par exemple, De Nittis, Lépine, Astruc, Lépic. La critique les ignorait, les rejetait, le public aussi. C’est ce qui va les pousser à organiser leur propre salon, aidés en cela par Nadar, sous l’égide de la Société des artistes comme je l’ai dit plus haut .

Une majorité de critiques défavorables, mais quelques unes plutôt positives malgré tout, comme celles de l’historien d’art et critique d’art français Ernest Chesneau qui dira, face au tableau Boulevard des Capucines de Monet:  » je suis face à un chef d’œuvre possédant des remarquables qualités d’observation et de couleur.  » … ou bien encore un autre critique d’art français, Jules Antoine Castagnary :  » C’est vif, c’est preste, c’est léger ! Si l’on tient à les caractériser d’un mot qui les explique, il faudra forger le terme nouveau d’impressionnistes. Ils sont impressionnistes en ce sens qu’ils rendent non le paysage pais la sensation produite par le paysage.  »

 » Boulevard des Capucines  » 1873 Claude MONET (The Nelson Atkins Museum of Art / Kansas City)

Malheureusement on ne peut pas dire que le succès fut au rendez-vous ce jour là. Ce fut un échec si l’on se place sur un plan financier (déficit de 3.713 francs) et au niveau de la fréquentation. Peu de toiles seront vendues. L’année suivante, un grand nombre d’entre elles le seront aux enchères. Leurs tableaux, aux petites touches juxtaposées, ne furent pas du goût de tout le monde, mis à part quelques esprits perspicaces.

Le fait d’avoir été autant critiqués ne va pas arranger la cohésion du groupe formé déjà par de fortes personnalités. Monet avec Renoir, Bazille (qui malheureusement va mourir jeune à la guerre) et Sisley ont eu la même idée dans la façon de peindre le paysage. Les deux premiers partageaient certains thèmes identiques comme la Grenouillère à Bougival. Cézanne et Pissarro étaient très proches, ils travailleront ensemble et appréciaient la campagne. Degas et Caillebotte(ce dernier rejoindra le groupe en 1876) étaient deux peintres fortement attirés par le dessin et la figure humaine, les maux du monde moderne comme la prostitution ou l’alcoolisme.

Pissarro participera à toutes les expos impressionnistes durant douze ans. Morisot et Degas seront présents a trois d’entre elles . Monet à cinq . Renoir et Sisley à quatre.. Manet a aucune. On notera la présence de Seurat. Gauguin et Redon pour certaines, ainsi que celle de Mary Cassatt.

De 1874 à 1886, leur peinture se tiendra en parallèle de leur époque, laquelle connaissait des grandes mutations industrielles, urbaines, sociales, et l’ouverture à des nouveaux loisirs. Tous ces artistes , avec leurs différences, vont, durant douze ans, se lancer dans une véritable aventure humaine et artistique. Le but aura été de présenter une peinture nouvelle et partant de cela on peut affirmer qu’ils ont apporté des idées novatrices quant à la façon de peindre ou de concevoir la réalité.

A la fin, ils ne seront plus aussi soudés qu’ils l’étaient au départ, et s’éloigneront les uns des autres. Il y a des amitiés sincères qui resteront malgré tout. Après 1886, ils recevront le soutien d’importants marchands d’art comme, par exemple, Durand-Ruel. Leur impressionnisme fera l’objet d’une grande évolution avec des nouvelles recherches émanant de la génération qui viendra après eux.

Le Musée d’Orsay va, comme je l’ai signalé, prêter de nombreux tableaux (178 au total ) pour d’autres manifestations en France ( 34 institutions dans treize régions ) qui aborderont différents thèmes comme la neige, la mer, les enfants, les femmes impressionnistes, ou la reprise de certains peintres dans des régions où ils ont vécu etc… Je reviendrai sur certaines d’entre elles.

De plus, une expo immersive en réalité virtuelle Un soir avec les impressionnistes en 1874 «  , organisée par le Musée d’Orsay, va se dérouler ce fameux 15.4.1874 dans l’atelier Nadar, comme si vous étiez durant 45 minutes !

8 réponses à « PARIS 1874 – Inventer l’Impressionnisme … Musée d’ORSAY »

  1. Quel article ! Cette année, il y aura , bien sûr, les JO. Mais aussi cet anniversaire des 150 ans de l’impressionnisme. Et quelle programmation !

    J’ai hâte de visiter cette expo et d’autres aussi ! En tout cas, un très grand événement !

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    1. Avatar de Lisa Pascaretti
      Lisa Pascaretti

      Merci beaucoup Tatoune ♥ C’est vrai que les J.O vont être très présents et que, probablement, les autres évènements culturels seront mis un peu en retrait à Paris, d’où l’importance d’en parler et d’aller les voir. Il était difficile de passer à côté de cet anniversaire et c’est formidable que ce ne soit pas qu’un hommage parisien finalement, et que l’on puisse profiter des diverses expos qui seront proposées un peu partout en France lors d’un week-end ou des vacances d’été etc… Donc profitons-en ! 😃🎨 et Joyeuses fêtes de Pâques !

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  2. bellissimi dipinti 👍👍👍👍👍👍👍👍

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    1. Avatar de Lisa Pascaretti
      Lisa Pascaretti

      Sono completamente d’accordo con te. È vero che sono magnifici e mi piace molto questo movimento impressionista. Grazie per il vostro interesse e vi auguro uno splendido week-end di Pasqua🌸

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  3. Quelle période ! Ma préférée ! Dommage que Paris ne sera pas accessible. Je ne sais pas si en province des expos sont prévues

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    1. Avatar de Lisa Pascaretti
      Lisa Pascaretti

      Il y en a énormément dans toute la France, en cette année anniversaire de l’impressionnisme, avec différents thèmes : la mer au Musée des Impressionnismes à Giverny, la neige au Musée Roger Quillot de Clermont-Ferrand , la nature (vaste sujet) à Tourcoing, Berthe Morisot et les femmes impressionnistes au Musée Chéret de Nice, Claude Monet à Vétheuil à Lille, Sensations et impressions à Strasbourg au Musée d’art moderne et contemporain etc etc … je vous en cite quelques-unes pour lesquelles vous pourrez voir si les dates et les villes peuvent vous convenir. Merci de votre message et je suis ravie que l’article vous ait plu ♥

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  4. Grazie per tanta bellezza 💐

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    1. Avatar de Lisa Pascaretti
      Lisa Pascaretti

      Con piacere e grazie Willy. L’impressionismo è un movimento meraviglioso e ha aperto le porte a molte altre possibilite pittoriche. ♥🎨

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